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A view of earth

Écofictions, Anthropocène et création artistique : figurations, récits, discours

  • Dernière modification de la publication :11 décembre 2023
  • Post category:Programme

La littérature environnementale a commencé son expansion dans la sphère occidentale dans les années 1970, dans le sillage du mouvement écologiste, dont la naissance emblématique est attribuée en partie au livre Silent Spring (1962) de la biologiste nord-américaine Rachel Carson. L’écologie est un sujet incontournable aujourd’hui. Le terme « écofiction », introduit en 1971 par John Stadler dans l’anthologie éponyme regroupant vingt nouvelles de différents auteurs anglophones (Bradbury, Steinbeck, Poe, Herbert…), désigne, dans son acception première, une histoire à portée écologique. La part importante dévolue ces vingt dernières années à la thématique de la catastrophe environnementale dans les récits, le cinéma ou les séries, ratifie sur le plan des mentalités collectives notre entrée dans l’Anthropocène, aussi contesté ce concept soit-il.

Ces deux concepts – écofiction et Anthropocène – permettent de poser les jalons d’une réflexion pluridisciplinaire et transdisciplinaire, portant non seulement sur les représentations de la catastrophe ou de la fin du monde, mais aussi sur la recherche d’alternatives à de tels scénarios, fondées sur d’autres façons de concevoir notre rapport au monde et au reste du vivant.

Le concept d’Anthropocène implique une « prise de conscience essentielle pour comprendre ce qui nous arrive » (Bonneuil, Fressoz, 9-10) qui prend des formes (des figurations, des manifestations artistiques) très diverses. De plus, cette prise de conscience n’est pas intrinsèquement liée à notre contemporanéité ; elle s’insère dans une tradition historique et politique, ce qui rend l’approche diachronique très pertinente. Même s’il ne fait pas l’unanimité au sein de la communauté scientifique, il a fini par devenir un point de ralliement entre disciplines diverses pour « penser ensemble cet âge dans lequel l’humanité est devenue une force géologique majeure » (Bonneuil, Fressoz, 19). Entre avertissements, spéculations et recherche d’alternatives, la question de la peur est également centrale

La dimension dystopique, apocalyptique, sensationnaliste, ne saurait occulter la diversité des productions écofictionnelles, ni leurs potentialités réflexives. Si les plus diffusées et remarquées du grand public sont celles qui explorent les conséquences paroxystiques (destruction de la planète, extinction de l’humanité) des actions des hommes sur leur environnement naturel, il en est d’autres qui, plus radicalement, interrogent et déconstruisent l’ontologie naturaliste dans laquelle nous baignons, en Occident, depuis Descartes et Darwin. Dans ces écofictions, l’homme n’est plus la mesure de toute chose. En représentant l’agentivité et parfois la subjectivité du monde non humain (végétaux, animaux, fleuves, lieux, matière, esprits…) et en variant les échelles (microcosmes, macrocosmes, habitants d’autres planètes…), elles ouvrent une voie d’accès aux ontologies alternatives au naturalisme (animisme, totémisme, analogisme) mises en évidence par l’anthropologue Philippe Descola dans son essai Par-delà nature et culture (2005) et contribuent insensiblement à la diffusion d’un nouvel imaginaire de notre écosystème.

Le séminaire a une vocation pluridisciplinaire. Il permet une approche synchronique et diachronique depuis la littérature, le cinéma et d’autres arts visuels, les arts de la scène, les médias, etc., à travers des genres ou modalités divers – fantastique, science-fiction, thriller, réalisme magique, littérature de jeunesse, roman d’aventures, chroniques sociales, littérature « marron », littérature « verte », poésie, docu-fiction, performances, etc. – propres à différentes aires linguistiques.